UNE APPROCHE ACADEMIQUE DU NGONDO PAR LE DR.ESOH ELAME
LES PROBLEMATIQUES DE DEVELOPPEMENT DURABLE :
le cas du Ngondo chez les peuples Sawa du Cameroun
Esoh Elamé, Docteur en géographie, Enseignant – Chercheur, Scuola Interateneo di Specializzazione
degli insegnanti del Veneto, Université Cà Foscari de Venise, Italie, courriel : esoh_fr@yahoo.fr
Résumé :
L'objet de notre communication est de montrer l'interaction qu'il y a entre la culture et le développement en Afrique noire. Plusconcrètement, en partant d'une pratique religieuse traditionnelle des peuples Sawa du Cameroun, nous allons mettre en évidence la
nécessité de prendre en compte les biens culturels matériels et immatériels de type magico-religieux dans les problématiques de
développement en Afrique subsaharienne.
Mots clés
: Afrique noire, Développement durable, Culture, Religions Traditionnelles Africaines (RTA)Abstract :
This paper attempts to present interaction between culture and development in Sub-Saharan Africa. More concretely,considering traditional religious practices of the Sawa people in Cameroon, we focus upon the necessity to take into consideration the
magic religious material and immaterial cultural heritage in the development of the area.
Keywords
: Subsaharian Africa, Sustainable development, culture, traditionnal African religionLe Cameroun est un pays de l'Afrique centrale ayant aujourd'hui
une population de plus de 16 millions (2006) et une mosaïque
impressionnante de 212 ethnies se côtoyant et continuant à
véhiculer leurs langues et croyances traditionnelles. Parmi les
communautés autochtones du Cameroun, on retrouve les peuples
Sawa, terme regroupant un ensemble d'ethnies vivant le long du
littoral camerounais pour qui l'eau imprègne très fortement leurs
traditions et cultures. Pour ces peuples, les cours d'eau ont
toujours joué un rôle important dans le façonnement de leurs
pratiques cosmogoniques dont la plus significative est le Ngondo
.L'objet de notre propos est de montrer l'attachement du peuple
Sawa au Ngondo, forme de religiosité traditionnelle et
l'importance de prendre en compte cet aspect dans les politiques
de développement durable. Pour illustrer cela, nous montrerons
en quoi consiste la pratique spirituelle du Ngondo et comment à
travers elle, les peuples Sawa s'approprient leur patrimoine
aquatique en tant que biens culturels matériels et immatériels de
type magico-religieux. Enfin, les fonctions socioculturelles du
Ngondo nous interrogent sur sa pertinence dans le
développement durable du littoral camerounais. Ce qui fait appel
à un éventuel pilier culturel /interculturel du développement.
Nous signalons d'emblée que la définition de la culture que nous
utilisons ici à savoir «
l'ensemble des traits distinctifs spirituelset matériels, intellectuels et affectifs qui caractérisent une société
ou un groupe social. Elle englobe outre les arts et les lettres, les
modes de vie, les façons de vivre ensemble, les systèmes de
valeurs, les traditions et les croyances»
fait référence auxtravaux de certains auteurs notamment Panoff et Perrin (1973),
Conférence Mondiale sur les politiques culturelles (Mexico,
1982), Déclaration universelle de l'Unesco sur la diversité
culturelle (Paris, 2 novembre 2001). A cela s'ajoute aussi les
modes de vie, les savoir-faire techniques, économiques,
artistiques et environnementaux, les modes d'organisation
collectifs. A partir du moment où les groupes sociaux se
construisent dans les relations qu'ils ont les uns des autres, ils ne
relèvent donc pas d'une essence immuable. De ce fait, la culture
des groupes sociaux n'est pas un phénomène figé mais un
processus en constante évolution se définissant en fonction de ses
caractéristiques propres et de ses relations avec celles d'autres
groupes sociaux. Les cultures sont donc en perpétuelle
construction et s'enrichissent mutuellement.
Les peuples Sawa du Cameroun
Le terme Sawa regroupe tous les habitants de la région côtière du
Cameroun (Figure 1). C'est un ensemble de peuples ayant des
origines bantoues et partageant un même héritage historique
radicalement marqué par certaines valeurs notamment le modèle
et l'esprit familial, l'hospitalité, le partage, la solidarité, les
pratiques langagières orales et gestuelles, etc. Les peuples Sawa
ont donc une armature culturelle commune où s'enchevêtrent
similarités linguistiques, rites, codes et pratiques religieuses
semblables. Pour ce qui est de l'occupation spatiale, les Sawa se
subdivisent en deux grandes composantes. Le premier groupe est
constitué de ceux qu'on peut considérer comme les premières
nations de la région côtière camerounaise. Il s'agit
particulièrement des Bakoko, les Bassa des régions autour de
Douala, Edéa et Yabassi et également d'autres groupes ethniques
à savoir les Ndokpenda, Yabassi, Yingui, Mbang, Bandem,
Yadimba, Yakalak, Njuki, Yansoki, Bonamateke, Yabea,
Ndonga, Adie,Yasuki, Ndokbiakat, entre autres. Le deuxième
groupe se compose d'un ensemble de peuples ayant un même
ancêtre fondateur. Ce sont notamment les Douala, les Bombedi,
les Bokumba, les Bakota et les Bose Minié.
SOURCE : VertigO – La revue en sciences de l'environnement, Vol7no3, décembre 2006
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