Michel Ndoh : Nous ne sommes plus qu'un pays de football
Michel Ndoh : Nous ne sommes plus qu'un pays de football
Membre de la délégation camerounaise présente à New-York pour commémorer l'esclavage, il parle de l'exposition dont il avait la charge.
Propos recueillis par Dorine Ekwè, 14 avril 2009
Vous avez participé à la cérémonie en cérémonie des victimes de l'esclavage organisée au siège des Nations Unies à New-York. Quel bilan faites-vous de cette participation?
Le bilan est largement positif. Le Cameroun a bel et bien réussi à faire passer le message sur le thème : "Rompre le silence tambour battant", en souvenir des victimes de l'esclavage et de la traite négrière transatlantique.
Concrètement, comment les choses se sont-elles passées à New-York ?
A New-York nous étions une délégation d'environ 30 artistes, experts et hauts fonctionnaires conduite par Mme Ama Tutu Muna, ministre de la Culture. Le 24 mars dernier, l'exposition des tambours et tam-tams a été inaugurée par le secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki Moon en personne, en présence du secrétaire général adjoint en charge de la communication et de l'information, Kiyo Akassaka, de l'ambassadeur du Cameroun à l'Onu, Toumo Monthé, du directeur exécutif du Schomburg Center for Research in Black Culture, Howard Dobson, partenaire de cette exposition.
Ensuite, notre ministre de la Culture a donné une réception au Dinning Room, avec un spectacle sur invitation, le tout présenté par Georges Colinet. Tous les ambassadeurs auprès des Nations Unies étaient invités, tout comme les médias, les hommes de culture, la communauté camerounaise, nos compatriotes de la diaspora.
La délégation camerounaise avait pour but de créer une synergie autour du thème "rompre le silence tambour battant "…
Tout à fait. Lors de la cérémonie d'ouverture, madame Tsala qui est une dame de 76 ans et la seule femme à jouer le tam-tam dans son village a passé le message. C'était très émouvant. Le 25 mars à midi, devant le siège des Nations Unies et en présence des ambassadeurs des Etats membres, du président de l'Assemblée générale et des medias, le secrétaire général a été accueilli par des musiciens et tambourineurs de divers continents.
Qu'est-ce que ce thème vous inspire ?
Le thème de cette exposition de tambours : "Rompre le silence tambour battant", reprend la pensée primordiale en Afrique. Il nous propose un monde plus beau, plus agréable et harmonieux entre les humains, les animaux et les choses. Il s'agit par conséquent, pour le tambour, de revenir à cet idéal à travers l'extase collective, la danse et le rythme. C'est pourquoi plusieurs disciplines culturelles ont accompagné cette exposition, entre autre un spectacle de danse et de musique autour du tambour.
Qu'est-ce que le pays a pu gagner de sa présence là-bas?
Aujourd'hui, il faut comprendre que la culture est un levier de diplomatie et par conséquent ouvre des portes. Ce que le pays peut gagner, c'est d'abord son image "corporate", l'intérêt qu'il suscite aujourd'hui, mais aussi l'attention qu'on lui accorde. Le Cameroun peut poser un problème aujourd'hui aux Nations Unies, et je suis persuadé que ce problème sera traité avec une plus grande attention. Bref, nous avons redoré notre blason. Le regard sur le Cameroun est différent aujourd'hui. Les Nations Unies nous regardent autrement et nous respectent d'avantage. Nous ne sommes plus simplement un pays de football, mais aussi et surtout un pays de culture.
Une exposition autour du tambour et qui a fait intervenir plusieurs disciplines culturelles. Comment cela s'organise-t-il ?
Les tambours et tam-tams sélectionnés pour l'exposition nous viennent des quatre aires culturelles du Cameroun (sawa, les Grassfields, soudano-sahélien et fang-beti). Ils proviennent d'une part des lamidat, sultanats et chefferies supérieures. D'autres nous ont été prêtés gracieusement par des collectionneurs privés. Le ministère aussi, depuis quelque temps, constitue sa propre collection.
N'y a t il pas de risques que ces instruments rares ne nous soient pas restitués ?
Nous avons pris toutes les dispositions pour que cela n'arrive pas. Par ailleurs, l'Organisation des Nations Unies est certainement l'institution la plus sérieuse au monde. Nous leur faisons entièrement confiance. Les instruments ont été assurés, à l'aller comme au retour, et rassurez-vous le ministère de la Culture n'a ménagé aucun effort pour nous mettre à l'abri des désagréments. Les perspectives sont nombreuses, et cela est plutôt encourageant. Je me garde d'en dire plus, mais sachez que cette exposition a déjà reçu plus d'une dizaine d'invitations à travers le mode, et qu'elle reçoit tous les jours ouvrables plus de 2000 visiteurs. Nous sommes heureux pour cela, d'autant plus qu'elle permet de vendre l'image de notre pays.
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