Engouement : Le passeport anglais vers l'emploi
Engouement : Le passeport anglais vers l'emploi
La langue de Shakespeare semble indispensable pour un meilleur avenir professionnel.
Jacques Eric Andjick (Mutations, 2008)
Le bilinguisme est la faculté d'un individu ou d'une population parlant deux langues. Ces dernières ayant même ou différent poids. Avec huit provinces d'expression francophones et deux autres parlant anglais, le Cameroun se range dans le second cas suscité. Mais de plus en plus, la population parlant français se rue vers les institutions spécialisées afin de pouvoir s'exprimer également en Anglais. " Au Centre Linguistique Bilingue de Douala, nos étudiants sont de plus en plus nombreux, au fil des jours ", révèle François Sa'ah Guimatsia, professeur dans cette institution. Au point où selon l'enseignant, l'Etat vient de créer un septième centre linguistique bilingue à Bertoua. Il ne reste que les villes de Ngaoundéré et Bafoussam, pour que toutes les provinces camerounaises, soient dotées d'institutions dispensant les cours d'Anglais et de Français.
Ce sont d'ailleurs les seuls établissements offrant des services en ces deux langues dans le pays. Mais pour la langue de Shakespeare, le British Council (Centre Culturel Britannique), le Centre Linguistique Américain et le Centre Culturel Américain sont d'autres centres spécialisés à l'enseignement de l'Anglais. Aujourd'hui, on y rencontre dans ces lieux, nombre de camerounais désireux de parler l'Anglais. " Depuis la décennie 2000, on note un véritable engouement pour l'Anglais. De la part des adultes voulant voyager. De la part des étudiants et des chercheurs d'emploi. Vraiment tout le monde semble être atteint du virus du bilinguisme maintenant. C'est essentiellement les francophones voulant connaître l'Anglais ". Telle est l'explication donnée par François Sa'ah Guimatsia. Et celle-ci n'est pas fortuite.
Les motivations bien que variant d'un étudiant à l'autre, sont majoritairement axées sur l'emploi. C'est le cas de Hervé, étudiant au Centre Linguistique Bilingue de Douala : " je fais les cours d'Anglais, après les conseils d'un parent. Qui a obtenu un poste à l'étranger et m'a suggéré depuis l'extérieur : tu ne peux pas te mouvoir aujourd'hui dans le monde, si tu ne parle pas anglais. Cela m'a réveillé et m'a permis de voir que le français seul, était insuffisant. Pour moi, qui suis à la recherche d'un meilleur emploi. Cela fait un an que je fais ces cours et j'espère en tirer grand profit en décrochant un bon boulot ". En tant que commercial dans une entreprise à Douala, Tatiana espère quant à elle exploiter la langue de Shakespeare, " pour plus d'efficacité dans mon travail. Notamment en facilitant les communications avec des clients non francophones. Vue que l'Anglais est la langue du business. Ainsi, je serai encore plus compétente dans mon boulot et je pourrais même avoir des promotions ", pense-t-elle.
Au Cameroun, la course au bilinguisme semble être essentiellement l'affaire des francophones. " Les étudiants en Anglais représentent plus de 90% des effectifs du Centre Bilingue de Douala. Tandis que ceux qui étudient le Français sont moins de 10%. Ils sont surtout des expatriés nigérians, des libanais et des latinos américains. Les Camerounais anglophones pensent qu'ils n'ont pas besoin d'aller dans un centre pour maîtriser le Français. Ils préfèrent se limiter aux connaissances apprises dans la rue. Ce qui est un tort. Car le français parlé au quartier ne remplace pas la langue soutenue, celle des affaires, le niveau auquel ils sont astreints. Donc les camerounais anglophones n'ont vraiment pas d'engouement pour étudier le Français. Ils se contentent du peu qu'ils apprennent au quartier ". Souligne François Sa'ah. Cependant, s'inscrire dans une institution pour étudier la langue de Shakespeare, être assidu aux cours et avoir de bonnes notes ne garantit pas de parler l'Anglais après plusieurs trimestres. Hervé, étudiant depuis un an au centre linguistique de Douala pense que " dans son établissement tout comme dans d'autres institutions, les profs ne font pas de miracles en Anglais.
C'est l'implication et l'engagement de l'étudiant après les cours qui le fait évoluer. C'est pourquoi, vous verrez que la progression dans l'expression n'est pas la même chez tous les étudiants ", dévoile-t-il. Comme pour renchérir l'affirmation sus évoquée par leur étudiant, des enseignants du centre linguistique de Douala pensent qu'en dehors du centre, l'étudiant doit se trouver des occasions de pratiquer l'Anglais, notamment en écoutant les anglophones parler. En suivant les programmes en Anglais, à la radio et à la télé. Bref en faisant en sorte que les oreilles soient habituées au son Anglais. Puisque selon le prof Guimatsia, " Une langue est un système de son auxquels les oreilles doivent s'habituer. Tant qu'il n'y a pas un certain nombre d'heures auxquelles tes oreilles sont soumises à ce code, ça passe mais ça n'a pas d'impact. Nous ne faisons que initier l'étudiant mais l'essentiel de son travail c'est sa formation hors du centre. Avec des gens qui parlent Anglais. En créant un univers, à travers les cassettes, des Dvd. C'est un travail inconscient qui met le cerveau à même de maîtriser la langue ", conclu-t-il.
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