L'HISTOIRE EMOUVANTE DU PEUPLE BATANGA
L'HISTOIRE EMOUVANTE DU PEUPLE BATANGA
Proposé par A. Mpeke Ntonga, 2006 article révise
ce 09/12/2012
Les Batanga sont des descendants de la grande
famille tribale Bantu, qui prend ses sources dans la partie est du continent
africain (Kenya…). Leur exode connaitra des stations dans le Centre Est du
continent (Ouganda, Burundi, Tanzanie…) le Centre (Congo, Zaïre, Centrafrique,
Cameroun, sans oublier de mentionner le Sud du Continent africain (Zimbabwe,
Sud Afrique) il y aurait plus d'un siècle avant JC.
Les Batanga du Cameroun, de Guinée Équatoriale
comme ceux du Gabon seraient des descendants de Ntanga Mu Mbèdi (fils de
Mbèdi). Ntanga mu MBèdi lui-même fils de Mbèdi, l'ancêtre commun d ; avec
les Douala. Plusieurs siècles avant JC, suite à fragmentations des familles et
autres développement claniques, le surpeuplement, les conflits intertribaux et
claniques, la recherche d'une vie meilleure et l’autonomie, Ntanga fils de Mbèdi
décide de détacher son clan de la grande famille Duala (les Mbèdi) et le
rebaptise Ba - ntanga. 'Ba' en langue Batanga comme en langue Duala et Malimba veut
dire ceux de la tribu de… Du clan de… Ce qui définit l'appartenance à un groupe
ou un clan. Chez les Bantu, les tributs ou les clans portent très souvent les
noms des chefs. Il incite alors l'exode vers le sud littoral du Cameroun
(Kribi) par la côte atlantique.
La première station de cet exode dans la
région Kribienne commence à l'autre rive de l'embouchure du fleuve Nyong opposé
à la région de Muanko. C'est dans cette embouchure de la région de Kribi que
s'infiltre la première partie de la famille de Mbèdi et Ntanga ou Tanga. Un premier
groupe occupe ce qui reste aujourd'hui des villages Enda Bonga, Badanguè,
Béhondo alors que l'autre groupe sera mené par le frère de Bonga. Bonga est le
frère cadet de Mbèdi.
Tous ces villages font partie du district de
Batanga Nord (petit Batanga). Il faut remarquer qu’une fois de plus que chez
les Bantou les noms des villages ont une signification ou une fonction bien
établie. Ici par exemple, Enda Bonga dérive de 'Ehenda Ya bonga' ce qui veut
dire l'embouchure de Bonga en langue Batanga. Dikobè dérive de 'Ikobè'. Ce qui
veut dire atteindre. En corrélation avec l'atteinte après une longue marche par
exemple.
La grande partie du clan dirigé par Ntanga et
son père MBèdi (vieillissant) continu l'exode le long de la côte Kribienne et
s'infiltre dans la région par les principales embouchures parmi les nombreuses
qui jalonnent la région de Kribi. Une autre partie de cet exode s'infiltre à Mpolongué,
Elabè, Ndibwè, Ngohè, Mboamanga... Il faut cependant noter que la présence des
groupements Mpalla, Bahabané, Bébambwè, (Bapuku) est né de la volonté de l’administration
locale de regrouper les travailleurs Bapuku venus de Grand Batanga pour offrir
la main d’œuvre lors du développement industriel de la région Kribienne. Il
aussi préciser que contrairement à ce que écrivent certains historiens,
Mboamanga veut dire le territoire de ceux de la plage. Ou alors Le village de
la plage. 'Mboa ya Manga'. Non pas le village de Manga. Mboa en langue Batanga
veut dire le territoire, le village, le pays. 'Manga' veut dire la plage. C'est
par soucis de marquer leur territoire dû à la fascination due aux plages
trouvées sur leur chemin le long de l’exode et à cause du fleuve kienké
(Lohové) qui se déverse directement dans la mer. Un autre groupe s'insèrera à
Bongandwè, et à Bwambè, Lobé. Le chef suprême Ntanga prolongera son exode
jusqu'à ce qui est aujourd'hui Batanga-Sud (Bongaélé/Grand Batanga).
C'est à Bongaélé que s'installe la chefferie
suprême de tous les Batanga. Les sujets de la chefferie suprême partent de tous
les villages de Enda Bonga à Mboamanga et ailleurs pour participer aux
festivités de la chefferie suprême à Bongaélé (Grand Batanga). C'est ce
collectif de villages que les Batanga appellent aujourd'hui le 'Nsaka Mu
Manga'. Les déplacements alors se font à pied ou en pirogues. Ils durent une
demi- journée et même des journées de marche à pied pour les habitants d'Enda
Bonga et Dikobè et Lohonguè, Londji et Mpalla. (Remarquez que les villages
Batanga sont situées en bordure de la mer et non loin d'une embouchure) C'est
lors de ces voyages festifs le long de la mer que les rencontres incongrues
s'opèrent avec les génies des eaux. Les très légendaires Mengu ou Mamiwata ou
encore Yémandja, moitiés humaines et poissons). C'est aussi l'occasion des
moments de retrouvailles et trouvailles mystérieuses sur le sable des plages
(miroirs peignes, étoiles de mers scintillants dans la nuit, bouquets de fleurs
etc.…) Tous ces objets ont des vertus de communication, de disparition, de
guérison, et de protection et aussi de donner la mort ou des maladies. Jusqu'à
aujourd'hui la légende perdure et se transmet de génération en génération.
Lorsqu' arrivent les blancs missionnaires, et
prospecteurs pour esclaves les festivités traditionnelles sont abolies et
condamnées. Le peuple entre alors dans une des périodes troubles de son
existence. L'industrialisation au cours du 18 me siècle incite la recherche de
la main d'œuvres moins cher ou pas payé dans le monde. Déjà l'Afrique du Nord connait
cette pratique (quelques siècles avant JC) avec les arabes qui descendent
jusqu'en Somalie Bantu et dans l'ancienne Nubie (Égypte) pour acheter ou
Kidnapper des esclaves noirs. Cette inhumaine pratique devient malheureusement
récurrente jusqu´en 1880 avec la traite négrière qui touche la région de Kribi.
Les Batanga verront plusieurs des leurs
embarqués vers ce qui est devenu un voyage sans retour vers l'Europe ou
simplement les profondeurs abyssales de l'océan atlantique où beaucoup
périrent. Les chefs traditionnels acceptèrent le départ des hommes vers
l'Europe avec la promesse des occidentaux qu'ils reviendront une fois leur
besogne (contrat) accomplie. La pratique de l'esclavage incite le troc et
l'importance de l'argent au travers des populations locales. Cela favorise la
détérioration du système économique traditionnelle qui existe entre les clans,
basé sur l'échange et le partage communautaire. La main d’œuvre (forte) est
déportée. L'agriculture et la pêche, activités principales de ce peuple, sont
de moins en moins pratiquées. La pêche n'est plus une activité lucrative à
cause de l'absence de vigoureux pêcheurs qui prenaient la sardine très loin au
large de l'océan atlantique. Nous ne saurons pas estimer le nombre de Batanga
déportés vers l’Europe, l'Amérique où les iles Caraïbes. Mais compte tenu de la
proximité des villages avec la mer, le peuple Batanga a dû être sérieusement
vidé de sa population. Cette disparition reste un deuil dans la conscience des
Batanga qui n'ont jamais oublié dans leurs prières ceux qu'ils ont perdu et
qu'ils ne reverront plus jamais.
Les Batanga comme beaucoup de peuples côtiers connaitront
les trois colonisations du Cameroun. L'Allemande d'abord en 1884 après que les
rois Akwa et Bell signent avec la Maison Woermann le traité Germano-Douala. (Histoire
du Cameroun- Wikipédia. p 2). Les conséquences de la signature de ces traités
vont provoquer l'occupation Allemande menée par Gustave Nachtigal, qui hissera
le drapeau Allemand en territoire de ce qui allait devenir Kamerun. Cette
occupation se renforce le 15 Octobre 1887 par la prise de la région de Kribi
notamment la Chefferie de Bongaéle/Grand Batanga. Le chef Madola y résiste et
est tué dans une fusillade par les Allemands après que Douala Manga Bell soit à
son tour exécuter à Douala.
Les Batanga résistent à cette occupation
Allemande à Mboamanga (Kribi) avec en chef de file le rebelle Ndjondje ya
Badanè qui défie l'armée Allemande grâce à son armée traditionnelle et ses
forces surnaturelles qui le confère le pouvoir de transformation en objets. Son
secret de transformation sera révélé par un de ses proches lieutenants aux
Allemands et il est localisé par ses mêmes informations. Ndjondje Ya Badanè est
fusillé dans sa hutte de combat surpris dans sa sieste. La peur des Allemands
ne permis point de savoir jusqu'à aujourd'hui où est enterrée sa dépouille. Il
reste une légende dans la communauté Batanga. La présence Allemande ne déplu
point au peuple Batanga qui apprend beaucoup aux côtés de ceux- ci. Ils
(Allemands) s'établissent à Kribi, créent des usines des écoles ….
Le peuple Batangas a alors de l'admiration
pour le savoir-faire Allemand. Beaucoup de Batanga collaborent avec les
Allemands durant la première guerre de 1914. Une grande partie s’exile
également pendant la même période en Guinée Équatoriale pour fuir la guerre de
14-18. Ceux déportés dans la partie Sud-ouest du Cameroun (Victoria aujourd'hui
Limbé, Buea etc. décidèrent de retourner au pays. La première vague arrive le
14 Février 1916. La seconde suivra le 9 Mai 1916. C'est pourquoi depuis 89 ans
les Batanga commémorent le retour au pays natal de déportes par le 'Mayi' tous
les 9 Mai et le 'Febuary' tous les 14 Février. Les Batanga reconnus par les
Alliés (Français et Anglais) pour avoir de la sympathie pour les Allemands
seront brutalisés et marginalisés par l'administration Franco- Britannique.
Les français en particulier s'employant à
faire disparaitre dans la conscience et la vison du peuple Batanga comme à
d'autres peuples Camerounais tous ce qui est Allemand et propres à leurs
traditions. Un programme draconien est instauré dans les écoles pour
l'apprentissage de la langue et la culture française. Les méthodes sont ici
encore plus brutales que celles des Allemands. Une brutalité non pas seulement
physique, mais psychologique. Les Batanga qui sont familiarisés avec la Lange
germanique ont beaucoup de mal à intégrer le français et l'anglais. Ce qui ne
va pas sans conséquences punitives. Un mode de pensée qui est imposé aux
Batanga comme dans toute l'étendue du territoire nationale vise à
l'annihilation de leurs propres valeurs traditionnelles et l'assimilation à la
culture française.
Les Anglais vécurent assez longtemps dans les
territoires batanga. Leur pénétration dans les communautés Batanga est modérée.
Ils enseignent leur langue aux Batanga soignent des épidémies, créent des Églises.
On trouve cette présence Anglaise dans l'emprunt de certains mots Anglais par
la Langue Batanga tels que 'tea spoon'= tispoundi. 'Coboti'=Cupboard,
'Comoni'=Come on! Etc.…
La française d'abord. La période d'occupation (tutelle)
influence profondément le développement politique du Cameroun le peuple Batanga
avec. Alexandre Douala Manga Bell est élu député avec Paul Ajoulat au parlement
français. Mais c'est en 1946, qu’est créée la première assemblée représentative
du Cameroun qui changera de nom en 1952 pour devenir ATCAM. Un Batangas siègera
dans cette honorable assemblée. Son nom est Ntonga Bokamba Aloys Vilmorin. Il
entre ainsi dans l'histoire politique du Cameroun pour avoir été l'un des
instigateurs du 'club des huit' qui comprend Pierre Soppo Priso, et qui est par
ailleurs la première opposition parlementaire aux français et au régime de
Amadou Ahidjo. Ntonga Bokamba Aloys est plusieurs fois au cours des assemblées
incarcéré à cause de son opposition au dictat français par Gaston Defferre
alors représentant de la politique des colonies. Bokamba Bo Ntonga Aloys brille
alors par son éloquence, son intelligence, son patriotisme et son honnêteté
politique. Il défend sans complexe le département de l'océan à L'ATCAM (Assemblée
Territoriale du Cameroun). Il s'oppose à la loi cadre de Gaston Deferre sur la
création d'États sous tutelles. Il défiera d'ailleurs Pierre Mesmer à cette
époque Haut-Commissaire français à ce sujet. Ce qui lui vaut d'être contraint
de quitté l'ATCAM vu l'hostilité française qui orchestre déjà des assassinats
d'opposants qui ne se soumettent pas au Dictat français.
Plusieurs réalisations voient le jour sous son
mandat qui ne dura malheureusement que trois ans. Une année après sa démission,
Ruben Um Myobé un de ses meilleurs amis est assassiné (1958). Ntonga Bokamba
Aloys, quoi que pas très adulé par son peuple, n'en demeure pas moins l'une des
figures emblématiques. Sa présence inspire plus tard des jeunes Batanga qui,
aujourd'hui représentent valablement le peuple Batanga / Sawa et le Cameroun
dans les plus hautes responsabilités nationales. (A suivre )
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