BONA SAWA

Les télécentres communautaires placent les zones rurales au coeur de la société de l'information.

Roger A. Taakam

La semaine dernière, le ministre des Poste et Télécommunications, Bello Bouba Maigari est allé inaugurer deux télécentres communautaires à Ambam et Bengbis dans la Vallée du Ntem (province du Sud). Il s'agit d'un dispositif de type multimédia par lequel les utilisateurs, ruraux pour la plupart, ont accès à des plates formes numériques exploitant l'informatique, les télécommunications et l'audiovisuel. Grâce à ces télécentres, les populations rurales, jusque-là analphabètes du village planétaire, pourront communiquer par e-mail, faire des transactions électroniques, procéder à des échanges de données (voix, textes, sons, images…) Tout cela à moindre coût. Pour parler en terme de stratégie de mise en œuvre des Tic, on dira que voilà un bel exemple de réduction de la fracture numérique tel que recommandé par le Sommet mondial de la Société de l'information.

Si l'action est à louer, en attendant bien sûr que les initiatives se multiplient, on ne peut cependant s'empêcher de reconnaître que les télécentres communautaires n'arrivent que très tardivement au Cameroun, comparativement à des pays comme le Sénégal et le Nigeria, où les efforts de réduction de la fracture numérique en zone rurale sont une réalité depuis bientôt une décennie. Ce qui est bien, malgré tout, c'est que les populations de chez nous finissent par s'approprier ce puissant outil de réduction de la pauvreté qu'est l'internet, en allant puiser dans le tréfonds de son réseau tentaculaire tout ce qu'il regorge comme potentiel en tant qu'accélérateur de développement. Mais, comme on le verra très rapidement avec ces nouveaux télécentres, il ne suffit pas d'acquérir de la technologie, pas plus qu'il ne suffit de connecter des populations analphabètes au monde entier. Cela ne résout aucunement l'épineuse question d'une société de l'information inclusive.

Il se pose la question de leur pérennité. Tant au niveau de la maintenance des équipements que de la pertinence des contenus. Car aujourd'hui, il ne suffit pas d'envoyer et recevoir du courrier électronique, il faut se placer durablement comme acteur et auteur dans la société de l'intelligence.

Pour les télécentres communautaires qui ont été inaugurés la semaine dernière, on serait fier de passer très rapidement du stade de l'émerveillement face à l'outil pour atteindre celui de la production des contenus, à travers notamment la numérisation et la diffusion des savoirs locaux via le web, la maîtrise des plates-formes de formation à distance ainsi que l'appropriation des technologies de développement web, dont ont sait qu'elles sont essentiellement évolutives. Tels sont les véritables challenges des télécentres communautaires.

Source: Mutations,2006