BONA SAWA

BONA SAWA

UN TOURS A KRIBI AVEC QUELQUES DETOURS

 

Dans la chaleur de "Kribi by night"

 

 La nuit venue, la cité balnéaire respire un autre air que celui du large.

 

"A Kribi, tous les soirs il y a mouvement ". Le conducteur de moto-taxi lâche la phrase comme si la chose allait de soi. Et ne se montre pas avare en renseignements pour ce client curieux. Les filles ? " Vous pouvez les trouver au carrefour Kinguè. " Mais avant d'arriver à cet endroit si prometteur, le reste de la ville mérite bien un coup d'œil quand c'est la lune qui trône dans le ciel.

 

Premier arrêt, Mboa Manga. Coin chic et tranquille, " pour les boss ", selon un Kribien. Quelques gargotes s'offrent à la vue du noctambule. Lumières tamisées, ampoules vertes ou rouges, tables couvertes de boissons et de parasols inutiles — il n'y a plus de soleil à " parer ". Ici, de jeunes femmes habillées légèrement — dos nu de préférence — tiennent compagnie à quelques clients apparemment sereins. Là, dans un coin plus sombre, des participants à un séminaire logés pas loin vident méthodiquement des bouteilles de bière sans défense. En face, une vendeuse de poisson braisé commence son office : le charbon est rougi et les premières pièces sont sur le grill : des bars à la peau argentée, qui vont bientôt se dorer sous l'action du feu.

 

D'un bar fusent les notes d'une chanson de l'artiste algérien Khaled : " C'est la nuit, c'est la nuit, c'est la nuit qui m`entraîne et me noie ". De quoi bien commencer sa soirée. " A Kribi, on n'agresse pas ", assure une jouvencelle attablée à l'estaminet. D'accord. Le pont sous lequel la Kienke célèbre bruyamment sa rencontre avec la mer est enjambé à pied. Le reste du parcours se fera à moto. Les quartiers traversés semblent tranquilles. Quand la nuit tombe sur le chef-lieu de l'Océan, Mokolo, Quartier Zaïre, New Bell et autres semblent s'assoupir et attendre la prochaine sortie du soleil.

 

"El Pichichi"

 

Mais toute la ville ne dort pas. A Petit Paris, où l'enseigne d'une auto-école française jette son rectangle de lumière à la face de la nuit, ça bouge un peu. Plus avant vers le centre ville, vous tombez sur le portier du dancing Liberté Espoir, qui apprête ses tickets. " L'entrée est gratuite, mais à l'intérieur il faut payer sa consommation à 500 F", indique-t-il. Au " Six à six ", l'ambiance est déjà un cran au-dessus. Des jeunes se trémoussent dans ce bar de NewTown, sous le regard de buveurs installés à l'extérieur. Le jeune Nathan, une bouteille à la main et un début d'ivresse dans le regard,

 

profite de la présence d'un journaliste pour protester contre le peu d'intérêt accordé au rugby national...

 

Finalement, voici le carrefour Kinguè. Forte concentration de bars, vendeurs ambulants, motos-taxis, et… filles libres. Pas de doute, nous sommes à l'épicentre du séisme d'ambiance qui frappe la ville le soir. Le carrefour est comparable à un cœur gigantesque qui aurait pompé vers lui le sang de ses artères. Dans une des buvettes du coin, un groupe d'assiko attire bon nombre de badauds. Son nom, " La voix des ancêtres El Pichichi ". Ça ne s'invente pas. Des prestations diverses sont offertes : le classique coup de la bouteille en équilibre sur la tête, puis une variante, avec deux bouteilles. Par la suite, ce sont les coups de reins robotiques d'une danseuse, la taille ceinte d'une grosse bande de pagne, qui tiennent les spectateurs en haleine. L'ambiance monte.

 

A quelques pas, " Rue de la joie " s'affiche à l'entrée d'un bar. No comment. Les tables sont occupées par des gens qui ont tout, sauf l'air pressé. D'ailleurs, l'air est un peu chaud en cette soirée de juin et autant prévenir tout risque de déshydratation, fût-il infinitésimal. Les risques d'ivresse seront combattus par le piment des grillades, très prisées en ces lieux, au même titre que l'alcool, la cigarette et peut-être même les préservatifs.

 

Il faut dire qu'une activité intense des filles de joie s'y prête. Le défilé va dans tous les sens. Ou, plus précisément, en direction des auberges qui ne manquent pas dans les environs. Les ampoules rouges sont plus indicatives que décoratives. Chacun est libre de vérifier. La nuit va avancer et les excès davantage se manifester. Assise au bord de la route, dos à l'asphalte, telle consommatrice au regard vide va répandre le reste de sa bouteille par terre. Avant d'invectiver ce jeune homme qui, semble-t-il, s'est gaussé d'elle, le tout en se commandant des soyas épicés à souhait. Entre mille bruits, la pétarade d'une moto se souligne. C'est parfois un couple qui prend une destination pas du tout mystérieuse. D'autres duos se formeront et suivront. A moins que l'affaire soit bouclée dans les environs du fameux carrefour.

 

Du fond de la nuit, une voix s'échappe d'un dancing. La chanson à succès de Ronz monte comme un avertissement adressé à tous les amateurs du " mouvement ". Mais pour l'instant, personne ne semble ému par le fameux " Keleuk, sors ! ". L'ambiance va continuer jusqu'au matin.

 

 

Source:Cameroun Tribune.



03/08/2006
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