L’AFRIQUE, SON DÉVELOPPEMENT ET L’APPROCHE COMMUNAUTAIRE
L’AFRIQUE,
SON DÉVELOPPEMENT ET L’APPROCHE COMMUNAUTAIRE.
Jeudi, 08 Juillet
2010 09:39 |
Durant ces deux dernières décennies le développement de l’Afrique a
suscité plusieurs « interrogations » et des « doutes »
persistent quand à la capacité des dirigeants africains à parler d’une seule
voix dans le but de trouver des « solutions durables » en
perspective d’un décollage économique. Dans un monde globalisé qui se dit « moderne
», l’« aide au développement » en faveur de l’Afrique aurait pu être
une issue pour éradiquer la pauvreté et améliorer durablement les conditions
d’existence des populations locales. Par Dr Alpha AYANDÉ.
Malheureusement,
cette fameuse « aide au développement » convoyée tous azimuts
et tant convoitée par les « gouvernements » des pays africains
a très vite était perçue comme un instrument permettant d’asseoir une autre
forme de « domination » et, aujourd’hui la plupart des
spécialistes du développement s’accorde sur son inefficience à savoir son
insuffisance et son caractère à la fois « addictif » et
« pernicieux » dans la promotion d’initiatives locales et la
résolution des problèmes des pauvres et nécessiteux africains. En revisitant
l’abondante littérature sur l’aide au développement en Afrique, il a été aussi
question de s’interroger sur un bon nombre de projets de développement qui
n’atteignaient pas leurs objectifs en termes de résolution des problèmes des
populations. Á ce titre, il semble intéressant de souligner que les modèles
d’intervention qui s’appuyaient prioritairement sur une approche communautaire
du développement avaient plus de chance de réussir. L’orientation des
stratégies de développement vers une approche communautaire constituerait de
nos jours, une alternative à la réalisation de programmes économiques et
sociaux en direction du continent africain.
Le modèle d’intervention
par une approche communautaire est plus que jamais indispensable pour briser
les cercles de dépendances liés à l’aide ; dans la mesure oú il ne se limite
pas seulement à donner à l’individu en quête d’une meilleure qualité de vie un
pouvoir; il exige autant la protection contre les aléas climatiques et
les pollutions environnementales afin que les populations pauvres qui sont
concernées puissent se réaliser par des emplois valorisant leur compétence,
leur donnant de la satisfaction et, à l’occasion, participer durablement
au choix des stratégies politiques de promotion et de développement de leur
communauté. Une nouvelle approche plus efficace de la coopération au
développement au profit du continent africain, intégrerait davantage les aspects
multifactoriels de la dimension communautaire. Cette dernière, demeure
incontournable dans un contexte de mondialisation caractérisé par de
fortes inégalités économiques et sociales, crises cycliques, guerres
économiques, conflits armés, mouvements irrédentistes, alliances opportunistes
et revendications qui fragilisent d’une manière ou d’une autre les perspectives
de développement des pays africains.
RESPONSABILISER L’INDIVIDU DANS LA SOCIÉTÉ
Malgré la multiplicité
des plans de développement qui ont été mis en œuvre dans ces pays sous
développés africains, il reste un fait remarquable ; la pauvreté continuent de
gagner du terrain et atteint des proportions inquiétantes. Et que faire face au
sous-emploi et au chômage endémique chez les jeunes africains ? Pourquoi autant
de jeunes, d’hommes et de femmes « libres » fuient l’Afrique en prenant les
chemins de l’exil ? Est-il possible de mettre en place des modèles de
développement qui s’articulent principalement autour de la responsabilisation
des populations locales dans la recherche de solutions durables en vue de
l’amélioration de leurs conditions de vie ? Si l’approche communautaire est vue
comme « une stratégie d’intervention qui mise sur le potentiel des
individus, des réseaux sociaux, des groupes communautaires et des ressources
issues d’elles-mêmes pour prendre en main leurs problèmes économiques et
sociaux; il s’agit toutefois d’une stratégie d’intervention qui cherche à
procurer du pouvoir, des moyens et du support pour que se réalise ce potentiel
» (Bourque, 1987). L’approche communautaire fournit également « une
perspective d’intervention qui consiste à supporter le pouvoir des personnes,
des groupes et des collectivités dans la recherche de solutions aux difficultés
qu’ils rencontrent ou dans leur volonté de répondre eux-mêmes à leurs besoins.
C’est une philosophie qui cherche à redonner aux personnes et aux collectivités
le pouvoir qui leur revient et qui peut inspirer en ce sens différents modes d’interventions
» (Gingras, 1991). Ces deux approches assez efficaces, ont un seul point
commun. L’implication et la mise à contribution de tous les membres du corps
social.
Cette implication
suppose simultanément une déconcentration des pouvoirs centraux en faveur des
groupes sociaux en reconnaissant leurs compétences locales, et en les
responsabilisant par rapport aux prestations qu’ils reçoivent des services
publics. Ainsi, Les organisations de base constituent la courroie de
transmission dans la mesure oú elles permettent aux membres de se doter d’une
certaine capacité d’intervention stratégique qui influencerait l’évolution
économique et sociale de leur communauté. Au niveau africain, cette situation
se traduirait par l’adoption des stratégies de développement davantage centrées
sur une approche communautaire voire régionale, qui offrirait aux africaines et
aux africains les moyens de vivre ouvertement mais entièrement dans leur
communauté en leur redonnant l’opportunité de réaliser des progrès substantiels
par le biais de la reconnaissance des compétences dynamiques du réseau social
local dans la résolution des problématiques liées à leur développement
économique.
INSTITUTIONS, ATTITUDES ET EFFICACITÉS ORGANISATIONNELLES
Avec la « libéralisation »
des marchés, la compétition s’est installée avec une férocité soutenue entre
les entreprises, et par voie de conséquence les pouvoirs publics africains
doivent relever ce grand défi qui est de permettre aux organisations du
continent de bénéficier des « retombées de la mondialisation » de
l’économie. Cette compétition à caractère global sous-tend des rapports de
force entre les pays riches et les pays pauvres ; et se décline inexorablement
en termes d’efficacité organisationnelle des services publics en vue de l’émergence
d’initiative locale durable. Les institutions panafricaines aussi bien que les
organisations gouvernementales africaines ont un rôle prépondérant dans
l’accompagnement et l’appui des dynamiques de développement communautaire. Pour
asseoir les bases solides d’une politique communautaire les institutions
régionales et les organisations gouvernementales africaines auraient besoin
d’être plus inclusives, transparentes dans leurs processus et fonctionnement
inhérents aux choix de développement en direction des populations africaines.
Il y a lieu également de mettre en place au niveau des services gouvernementaux
une véritable « culture entrepreneuriale » de l’efficacité, du
mérite et du dévouement pour l’« intérêt collectif » à la
place du « clientélisme politique », l’« impunité »
et les « passe-droits ».
Á la lumière de
telles dissonances entre les besoins économiques immédiats des populations et
la faiblesse des capacités de réaction des institutions africaines à gérer de
telles préoccupations, faut-il restructurer voire repenser nos institutions et
leurs modèles organisationnels afin d’accroître la visibilité de celles-ci ; au
regard du développement d’un cadre de coopération interétatique plus « solidaire »,
« pacifique », « démocratique », « transparent »
et qui n’occulte pas les objectifs stratégiques d’apporter des solutions
concrètes aux problèmes du continent noir ? Toute dynamique de développement ne
peut être fructueuse que si elle suscite une focalisation sur les objectifs
stratégiques par le biais de la cohésion des groupes concernés à savoir les
populations et les intelligences disponibles. Les problèmes de développement de
l’Afrique ne sont que partiellement économiques, ils sont pour l’essentiel
inhérents à la fragilité des institutions qui ont été mises en place. « Les
institutions sont constituées des idées qui dominent notre comportement, des
facteurs qui nous animent mais dont nous n’avons pas toujours conscience. Les
institutions sont plus puissantes que les structures organisationnelles parce
qu’elles structurent notre entendement, notre façon de voir et de penser »
(Hafsi, 2009).
Á l’exemple de la
Chine, ou de la Corée du Sud qui ont mis à peine un demi-siècle ans pour
faire décoller leurs économies et se hisser par la suite à des niveaux
développement sans précèdent, on en viendrait à se poser la question de la
lenteur avec laquelle certaines réformes sont mises en œuvre dans un contexte
africain : récuser le décryptage des raisons fondamentales de telles
contre-performances institutionnelles, serait une démonstration manifeste d’une
myopie absolue. Et, à vouloir interpréter ces contre-performances comme étant
éparses et éphémères, participe à une réticence au changement de certaines méthodes
prédatrices de gestion des biens publics. Les bons leaders ne se servent pas de
leur position pour s’enrichir sur le dos de leurs peuples, à l’opposé, ils se
consacrent entièrement à l’amélioration des services qu’ils sont censés rendre
humblement à leurs communautés. Les bons leaders mettent également des
stratégies de développement qui impulsent en permanence des changements
jusqu’au point oú les bénéfices économiques de leurs choix atteignent les
couches sociales les plus pauvres. Des « reformes », « recapitalisations »
et autres « indicateurs économiques et commerciaux », les
couches sociales les plus pauvres en Afrique ne comprendraient pas pourquoi
l’argent qui transite sur le continent africain leurs est insaisissable ? Il se
serait certainement dissipé comme une fugace étincelle vers d’autres horizons
ou bien ; il resterait exclusivement par-devers une oligarchie ploutocratique. Aimé
Césaire disait, « nous protestons contre le colonialisme, nous
réclamons l'indépendance, et cela débouche sur un conflit entre nous mêmes. Il
faut vraiment travailler à l'unité africaine. Elle n'existe pas ».
NOTES ET RÉFÉRENCES :
[1]. Bourque Denis :
« L’approche communautaire : recueil de textes ». Valleyfield Montréal,
1987.
[2]. Georges
Courade :
« Comment raconter le développement de l’Afrique… » Publié le
14/10/2007
[3]. Gingras Pauline :
« L’approche communautaire », dans Doucet, L., et L. Favreau, Théorie et
pratique en organisation communautaire, Sainte-Foy, Les presses de l’Université
du Québec, 1991, p. 187-200.
[4]. Gingras Pauline :
« L’approche communautaire : essai de conceptualisation »
Centre de recherche sur les services communautaires, Québec, Université Laval,
1988.
[5]. Hafsi Taïeb
(2009) : « Les pays en développement et les organisations : Vers une
institutionnalisation de l’ignorance2 ». Revue des Sciences Commerciales et
de Gestion, Éditions Laboratoire Études Pratiques en Sciences Commerciales et
en Sciences de Gestion, École Supérieure de Commerce d’Alger. N° 5, Décembre,
p. 7-27.
[6]. http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/actions-france_830/aide-au-developpement_1060/index.html
page visitée le 3 juin 2010
[7]. http://www.linternationalmagazine.com/article4.html
; page visitée le 5 juin 2010
[8]. http://bworldconnection.com/proverbescitations.html?idA=111&title=Citations%20et%20phrases%20c%E9%E8bres%20de%20Aim%E9%20CESAIRE,
page visitée le 28 juin 2010.
[9]. Jean-Louis Roy :
« L’Afrique, 50 ans après les indépendances : Le continent dispose de
nouveaux leviers qui lui ont fait défaut ces 50 dernières années pour défendre
ses intérêts économiques, financiers et politiques » ; Conférence
internationale de Yaoundé. Quotidien Le Devoir, Montréal 13 mai 2010.
[10]. Livre vert sur une approche
communautaire de la gestion des migrations économiques. Union Européenne,
Bruxelles, 11 janvier 2005.
[11]. Martin Ravallion
et Shaohua Chen. « The developing world is poorer than
we thought, but no less successful in the fight against poverty »
Development Research Group, World Bank Wahington 2008.
[12]. Rapport d’étude des Directions des
services Professionnels, CRDI, Montérégie-Est. (2003). « L’approche
communautaire : Cadre de Référence ». Montréal, Février 2003.
[13]. Sean Markey, Greg
Halseth, Don Manson. (2009) « Capacity, scale
and place: pragmatic lessons for doing community-based research in the rural
setting », Canadian Geographer Volume 54 Issue 2, Pages 158 – 176.
[14]. Thioub Ibrahima,
« L’Afrique et ses élites prédatrices ». Journal « Le Monde
» du 1 juin 2010.
[15]. Tournée Jane,
Van Esch Wilma et de Bie Jean.Louis.
(2004). « Approches et Pratiques en Contrats Communautaires », BIT,
Genève.
[16]. UNCTAD Report on Public Symposium
Responding to global crisis: New Development paths. Trade and Board
Development, Fifty-seventh session, Geneva, 15–28 September 2010, Item 11 of
the provisional agenda Hearing with civil society.
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